Vendredi 12 Septembre - le pas lent des chevaux

Depuis que je sais que la fin du voyage est proche, puisque je ne traverserais ni la Chine ni le Népal, l'esprit qui m'animait a changé: je n'ai plus un but à atteindre, je suis devenue flaneuse prenant le temps d'etre ici et de capter les beautés de ce pays. C'est ainsi que je m'offre pour la dernière semaine 4 jours de randonnée équestre autour du lac Song-Kol. Le circuit est sans doute plus touristique mais ne gache en rien l'authenticité des paysages traversés et des gens rencontrés. L'équipe est composée de deux couples, l'un francais l'autre allemand, nous sommes conduits par Iskoul notre jeune guide local de Kyzart qui se moque un peu de nos inaptitudes à l'équitation. Il faut dire que le départ est folklorique: pas l'un d'entre nous ne sait tenir un cheval et ceux-là n'en font qu'à leur tete. Le guide nous rabat tour à tour sur la piste mais nous n'avancons pas. La montagne est tout de suite majestueuse, grandes vallées encaissées aux pentes dénudées qui prennent les nuances de roses et de verts, passant par tous les mauves et les gris que la lumière peut imaginer. Les premières heures de randonnées ne sont pas aisées mais peu à peu je comprends la bete, lui refuse la gourmandise non gagnée, la laisse s'abreuver au ruisseau, la lance au trot avec des claquements de langue. Nous faisons connaissance tout comme avec les autres humains, David et Elena 3 mois de voyage, Guillaume et Caroline à leurs premiers pas de tour du monde.

Nous avancons au pas lent des chevaux, si lent que le soir tombe rapidemnent et avec lui la pluie et la neige bientot. Iskoul nous pousse alors vite vers les trois yourtes d'altitude que l'on voit au loin. Trot forcé sur des chemins poussiéreux à flanc de colline, la cavalcade est belle meme si le froid et la fatigue nous gagnent. Enfin nous sommes devant les yourtes. L'une est pour nous tandis que dans l'autre la grand-mère prepare le thé et le repas chaud.

Aimira, petite fille au sourire malicieux, vient jouer avec moi et me transmets rapidement son énergie vive. Je me sentais fatiguée mais voila que nous cavalons sur les pentes avoisinantes découvrant les alentours et l'économie d'une yourte. La petite cabane bleue isolée ce sont les toilettes. Le ruisseau pour le thé et les animaux. Les jeunes chevaux sont attachés aupres de leurs mères, les veaux dans un parc à part, les bouses de vaches séchées empilées au sec pour le poele qui nous réchauffe, un petit panneau solaire pour la rare lumière.

Nos hotes sont extremement chaleureux, la grand-mère nous sert le thé à la maniere kirghize si élégante : la petite théiere ornée d'une passette à son bec contient le concentré, la grosse théiere l'eau bouillante, elle ne nous verse jamais une coupe pleine, cela voudrait dire qu'elle ne veut pas nous resservir. Avec sa petite-fille, elle chante, danse et rit de toutes ses dents en or.

La pluie neigeuse a cessé, la lune apparait, nous sommes en pleine montagne sous une yourte à 3000 mètres. Il fait tres froid mais on empile les matelas et les couvertures en un long lit collectif, et, miracle, nous avons bien chaud pendant la nuit.